EN BREF
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Les musées français se trouvent confrontés à un défi environnemental de taille, émettant en moyenne 9000 tonnes de CO2 par an. Cette situation alarmante a été accentuée par la crise sanitaire qui a mis en lumière les questions liées à la durabilité au sein du secteur culturel. Désormais, des initiatives se multiplient pour réduire cet impact, allant de la mise en place de bilans carbone à l’adoption de pratiques plus durables dans la conception et la gestion des expositions. L’engagement des musées vise non seulement à respecter des objectifs écologiques, mais aussi à sensibiliser le public à l’importance de la préservation de l’environnement.
La question de l’impact environnemental s’invite de plus en plus dans les débats au sein du monde culturel. En France, les plus grands musées émettent en moyenne 9000 tonnes de CO2 par an, une réalité qui soulève des inquiétudes face à l’urgence climatique. Le défi est d’envergure : il s’agit non seulement de prendre conscience de cette empreinte écologique, mais aussi de réorienter les pratiques vers une durabilité nécessaire. Cet article explore les efforts engagés par les musées français pour réduire leur impact environnemental et relever ce défi crucial.
Le passage à l’action après la pandémie
Le monde culturel a été profondément transformé par la pandémie de Covid-19, révélant l’importance pressante de la transition écologique. Des voix, comme celle d’Aude Porcedda, muséologue, soulignent que cette crise a bouleversé les perceptions et les priorités, mettant en lumière les enjeux environnementaux au sein des institutions culturelles. Auparavant, peu de musées affichaient un intérêt marqué pour ces questions ; aujourd’hui, la tendance s’inverse et certains ont déjà mis en place des initiatives concrètes.
Des rapports révélateurs
Fin novembre 2021, le rapport Décarbonons la culture a servi de signal d’alarme concernant la vulnérabilité des institutions face aux enjeux énergétiques. Les recommandations du Shift Project, un think-tank dédié à la transition énergétique, insistent sur l’importance d’anticiper un avenir sans carbone. Dans ce contexte, le défi est d’autant plus grand pour les musées qui continuent d’émettre des quantités considérables de CO2 au cours de leurs activités.
La nécessité d’une reconsidération des modèles d’exposition
La crise sanitaire a révélé la nécessité d’un changement de paradigme dans la façon dont les musées pensent leurs expositions et leurs événements. Emmanuel Marcovitch, ancien directeur du Réunion des Musées nationaux, décrit un besoin urgent de sortir de l’ancien modèle, trop axé sur la croissance infinie, et de repenser les pratiques selon une logique de développement durable.
Réduction de l’empreinte carbone par la relocalisation
Il est désormais suggéré de relocaliser les activités des musées, de ralentir les projets et de diminuer les échelles. Éco-concevoir les scénographies, en optant pour une réutilisation des matériaux et en renonçant aux pratiques de gaspillage, constitue un axe essentiel pour réduire cette empreinte écologique. Ce changement ne peut se faire sans l’implication des équipes dirigeantes et des conservateurs, appelés à revoir leur vision des pratiques muséales.
Les musées de société comme précurseurs
Certains musées de société, comme celui du Quai Branly-Jacques Chirac, se sont positionnés en tant que pionniers dans cette quête de durabilité environnementale. Depuis son ouverture en 2006, ce musée a pris conscience de son rôle clé face aux menaces qui pèsent sur les écosystèmes et sur les cultures du monde. Avec des stratégies de réduction de l’empreinte environnementale mises en place dès 2014, ces institutions servent d’exemple pour d’autres musées traditionnels.
Des actions concrètes sur le terrain
Le musée du Quai Branly a collaboré depuis 2020 avec l’Agence des économies solidaires pour étudier la fin de vie de ses expositions, cherchant ainsi à limiter le gaspillage des ressources. Ce souci de durabilité est également partagé par d’autres institutions, comme Universcience, qui a été parmi les premiers à concevoir un Guide d’éco-conception des expositions.
Les musées d’art prennent conscience de leur empreinte
Au-delà des musées de société, les musées d’art commencent à comprendre l’importance de leur impact environnemental. Par exemple, le Palais des Beaux-Arts de Lille a récemment mis en œuvre une politique de développement durable pragmatique. Ce musée se distingue par son approche, qui consiste à limiter la fréquence des grandes expositions et à miser sur les œuvres des collections permanentes.
Expositions responsable : une nouvelle normativité ?
Dans le cadre de l’exposition Expérience Goya, l’accent a été mis sur un modèle écoresponsable, où le nombre d’œuvres a été intentionnellement réduit afin de limiter les transports, particulièrement énergivores. Ce type d’initiative sert de modèle pour d’autres musées, prouvant qu’une ingénierie intelligente et durable peut contribuer à la préservation de notre planète.
L’appui du Ministère de la Culture
Le gouvernement français a également conscience de ce défi et a récemment publié un Guide d’orientation et d’inspiration pour la transition écologique de la culture. Ce document entend établir des indicateurs clairs pour aider les musées à évaluer leur impact environnemental. Les efforts sont accompagnés de financements significatifs pour faciliter la transition.
Des investissements pour la transition
Avec un budget de 25 millions d’euros lancé pour soutenir des projets d’Alternatives vertes, le ministère s’engage dans un véritable effort collectif pour encourager les musées à changer leur manière de fonctionner. Des calculs d’impacts environnementaux pour la restauration des bâtiments sont également envisagés pour guider les établissements dans leurs futures rénovations.
Les pratiques de sobriété énergétique
Adopter des pratiques de sobriété énergétique est un axe fondamental dans la lutte contre le réchauffement climatique pour les musées. Cela inclut des actions telles que la limitation de la température des locaux, l’usage de matériaux écologiques pour les expositions, ou encore l’adoption des énergies renouvelables pour réduire leurs émissions de CO2.
Initiatives variées dans les établissements
Certains musées, comme Universcience, encouragent également leurs visiteurs à adopter des moyens de transport moins polluants, participant ainsi à la sensibilisation du public. Des actions concrètes, allant du raccordement au réseau de chauffage urbain à l’isolation améliorée des bâtiments, sont mises en œuvre pour faire face à la réalité des enjeux environnementaux.
Le rôle des écomusées et leur modèle inspirant
Les écomusées, avec leur ADN profondément ancré dans la sobriété et l’autolimitation, peuvent servir de modèle pour les institutions traditionnelles. Leur approche sociale et solidaire par rapport à l’environnement a souvent servi de guide pour une multitude d’initiatives plus écologiques au sein des musées français, mettant en avant l’importance du réemploi des matériaux.
Sensibilisation de la communauté locale
Ces institutions sont souvent impliquées dans leurs communautés locales, cherchant à susciter des discussions autour des enjeux environnementaux. La dimension de réemploi et la création de un lien entre l’humain et son environnement sont des valeurs fondamentales qui doivent imprégner plus largement les pratiques des musées.
Vers une culture des transitions
Afin de réussir cette transition, il est essentiel d’accompagner ce changement de normes par une véritable révolution culturelle. Les musées doivent dépasser l’aspect technique et réglementaire pour enseigner à leurs visiteurs une nouvelle culture qui favorise la durabilité. Cela nécessite également une adaptation des valeurs et des imaginaires collectifs sur les enjeux environnementaux.
Réflexion sur nos valeurs et représentations
Les musées ne doivent pas être perçus uniquement comme des espaces d’exposition, mais également comme des vecteurs de changement social. Dans cette optique, la réflexion doit se porter sur ce que ces institutions peuvent apporter en termes d’éducation et d’exemplarité pour inspirer d’autres secteurs. Les efforts déployés dans la sensibilisation et l’éducation seront cruciaux pour mener à bien cette transition.
Les expériences à l’étranger comme source d’inspiration
Il est également pertinent de regarder ce qui se passe à l’international. Des musées à travers le monde, tels que le musée d’Ethnographie de Genève ou encore des projets aux États-Unis comme celui du Baltimore Museum of Arts, montrent qu’une dynamique de transition écologique est possible et souhaitable. Ces initiatives démontrent qu’une collaboration internationale peut également enrichir les débats.
Influences mondiales et partage de bonnes pratiques
Les musées peuvent bénéficier des expériences d’autres pays, en adoptant des pratiques qui fonctionnent et en les adaptant à leur contexte. Le partage de bonnes pratiques à l’échelle internationale peut contribuer à créer un réseau solide et inspirant pour une transition réelle.
Concevoir un avenir durable pour les musées
La nécessité de faire évoluer les musées français vers des modèles plus durables est donc évidente. Au-delà de leur impact direct sur l’environnement, ils ont un rôle clé dans la sensibilisation des citoyens aux problématiques écologiques. En intégrant des pratiques plus vertes, ils s’inscrivent dans une démarche de développement durable qui peut profiter à l’ensemble de la société.
Un engagement collectif pour le futur
La réussite de cette transition passe par un engagement collectif et une stratégie pérenne. Musées, institutions, gouvernements et citoyens doivent unir leurs efforts pour faire face à l’urgence climatique. Seules une prise de conscience collective et un changement durable de pratiques permettront de réduire considérablement l’empreinte carbone des musées français et de construire un avenir plus respectueux de notre planète.

Les musées français face à un défi environnemental
La crise sanitaire a marqué un tournant dans la prise de conscience des musées français vis-à-vis de leur empreinte écologique. En effet, bon nombre d’institutions, qui émettent en moyenne 9000 tonnes de CO2 par an, ont reconnu l’urgence d’adopter des pratiques plus durables. Des muséologues et experts s’accordent à dire qu’il est temps d’agir. L’impact significatif de ce niveau d’émissions, qui équivaut à l’empreinte annuelle de plusieurs centaines de citoyens français, pose de réelles questions sur la durabilité des activités culturelles.
Lors d’un colloque sur la durabilité dans les musées, des intervenants ont insisté sur la nécessité de sortir d’un modèle de croissance exponentielle, souvent associé à une multiplication des expositions temporaires. Ils plaident pour un changement de paradigme, où l’innovation et la réutilisation des ressources prennent le pas sur l’expansion effrénée. Emmanuel Marcovitch, directeur de la Réunion des Musées nationaux-Grand Palais, a déclaré : « Il faut changer complètement de modèle d’exposition. » Cette insistante résonne dans le milieu artistique, soulignant une volonté de repenser entièrement le système de présentation des arts.
Les initiatives ont commencé à émerger avec une volonté affichée d’intégrer des pratiques écoresponsables. Par exemple, le musée du Quai Branly-Jacques Chirac a pris des mesures concrètes pour réduire l’empreinte environnementale de ses expositions, se souciant de la relation entre l’homme et la nature. Depuis 2014, il s’efforce de minimiser le gaspillage, tout en faisant appel à des stratégies de production durable dans ses projets.
De même, le Mucem à Marseille a engagé une véritable transformation, notamment depuis son exposition sur la gestion des déchets. Yamina El Djoudi, responsable du département culturel, a témoigné des efforts réalisés pour réduire la consommation énergétique de 20 % par rapport à 2013, affirmant que le musée s’est engagé à réutiliser au moins 50 % des matériaux utilisés pour les futures expositions.
Les musées d’art, traditionnellement moins responsabilisés, commencent également à réagir. Le palais des Beaux-Arts de Lille a institutionnalisé sa démarche écoresponsable. En 2019, il a entrepris un diagnostic des déchets et a décidé de ne pas organiser de grandes expositions chaque année. Au contraire, il s’efforce de privilégier les pièces issues des collections permanentes pour limiter les transports et les émissions associées.
Le soutien du ministère de la Culture a été crucial pour cette transformation. Le développement de guides d’orientation et le déblocage de fonds pour des projets écologiques témoignent d’un engagement officiel. Karine Duquesnoy du ministère a souligné l’importance d’une feuille de route destinée à accompagner tous les établissements dans leurs démarches de transition.
Tout cela marque un changement significatif dans la perception et l’engagement des musées face à l’urgence environnementale. Le défi d’éliminer ces 9000 tonnes de CO2 par an reste immense, mais la mobilisation croissante du secteur culturel montre qu’un virage vers la durabilité est en cours et qu’il ne sera pas facile, mais essentiel pour l’avenir.